Discussion à la suite de l’intervention de Thomas Hirschhorn
avec des diapositives, une vidéo….
Thomas Hirschhorn – Je veux donner à réfléchir, faire réfléchir.
Une personne du public: A la fois, vous nous offrez des images et une ambiance. Je suis allée voir votre exposition chez Chantal Crousel et c’est une vraie expérience de rentrer dans un univers et de se sentir vraiment capté. Je n’ai pas analysé cette chose-la. C’est pour cela que je suis venue vous écouter aujourd’hui. Cela m’a beaucoup intriguée et donc je vois cette image qui est permanence comme un feu de bois vous dites, mais je trouve que, par rapport au feu de bois, c’est un petit peu différent car elle nous berce, nous hypnotise, crée une espèce d’état heureux ou apaisant. Enfin, je ne sais pas, est-ce que vous pensez que ça a un effet sur la psychologie ?
Thomas Hirschhorn – Non, c’est simplement l’image d’un feu. Quand il y a un feu dans la cheminée, je le regarde de temps en temps. J’aime les vidéos où il ne se passe rien. Parfois, les gens à la maison ont la télévision allumée tout le temps et le son éteint et ils ne la regardent pas, mais ça les rassure. 1l y a une présence. Je propose des vidéos pour cela. Ce sont des vidéos d’ambiance. Vous pouvez mettre un feu ou une couleur ou un mouvement ou autre chose.
Cette même personne -: Elle s’adresse a quelqu’un. Vous, vous la concevez et l’adressez.
Thomas Hirschhorn – Non, je fais mon travail d’artiste, et je l’expose et je m’expose avec.
La même personne – Vous le transportez de lieu en lieu avec un public différent, ça fait partie de votre travail. Cela en est même l’originalité. Par exemple, Jean-Pierre Reynaud a fait un container, mais dans un musée, Duchamp a fait sa petite valise mais elle est invisible. Là, vous faites ce que vous appelez une grotte, autonome, c’est le public lui même qui change simplement, c’est ce que vous avez dit, et en plus nous sommes dans un colloque qui s’appelle « Art et Politique ». Je me demandais quel pouvait-être le lien entre votre travail et la politique, je pourrai vous poser la question comme ça, lorsque je vois cette petite berceuse.
Thomas Hirschhorn – J’essaie de faire mon travail politiquement. Pas un travail politique mais « travailler politiquement ». J’ai vu des images pendant les élections présidentielles : dans une région très éloignée, le maire d’un très petit village a transformé son salon en bureau de vote. Il n’avait pas d’argent pour acheter un isoloir, et certainement il n’y avait pas beaucoup de monde pour voter dans sa commune. Ce n’était donc pas vraiment nécessaire de pouvoir s’isoler. Mais ce maire a fait lui-même un isoloir en tendant un fil à travers son salon et en accrochant un drap bleu dessus. Comme cela, l’idée de l’isoloir était respectée, et ce maire a fait un travail politique merveilleux. Je veux dire que ce maire travaille politiquement quand il met sa créativité au service de son mandat. Je pense que c’est cela « travailler politiquement. » J’essaie de faire mon travail d’artiste comme lui…
Michel Barat – En quoi est-ce politique ? Moi je ne sais pas, il travaille politiquement, il le dit, ça doit être vrai donc. Cela dit, si l’on entend par politique le fait que cela soit porteur d’un message politique, ce n’est pas porteur d’un message politique, ou de telle ou telle idéologie. Je ne veux pas dire simplement qu’un rapport au monde qui dénonce l’ordre des choses n’est pas un acte politique. Qu’est-ce que ça veut dire quand il répond « c’est politiquement » ? Cela signifie tout simplement qu’il considère, j’ai cru comprendre cela, que de la même manière qu’un maire qui construit un isoloir avec un bout de drap fait un acte par rapport à un environnement dans lequel il se situe, lui a un métier qui consiste à faire des oeuvres d’art, il le fait avec des objets. Nous, on interprète ce décalage comme un décalage d’absurdité, de dénonciation, mais c’est notre problème, ce n’est pas le sien, c’est cela que j’ai cru comprendre…
Artistes et Intervenants :
Francesc Abad
– Mohamed Elbaz
– Philippe Laleu –
Véronique Pattegay
– Alfonso Vallès –
Niek van de Steeg –
Dominique Wade
– Bruno Yvonnet – Dominique Frot – Jean-Pierre Guillard – Farid Berki – Pedro Pauwels