A comme applaudissement (la Bande à Karamazov et S. Freund)

Evidemment, je partage parfaitement votre opinion. Il est tout à fait remarquable que les habitants des grandes métropoles apparaissent à leurs fenêtres chaque soir à vingt heures et qu’ils applaudissent spontanément, et sans l’encadrement des apprentis prophètes, le personnel hospitalier en lutte contre le coranovirus. Mais je tiens cependant à souligner qu’un habitant présente toutes les caractéristiques d’une entité autonome et qu’il est parfaitement exclu qu’il doive se fondre dans une masse homogène. A vingt heures deux chaque soir j’écoute les applaudissements et j’entends : « Bonjour Monsieur Merejkowsky, alors comment allez vous ce soir à vingt heures ? Vous vous sentez bien ? C’est Ivan de la bande à Karamazov qui vous parle,  je suis ton démon, pas le diable mais le démon qui reflète tes pensées du moment, tu prétends te réfugier derrière le fait, le fait, comme ton pote de l’International point .2, alors dans ce cas pourquoi est ce que tu m’écoutes alors qu’une observation attentive te permettrait de constater que tu n’écoutes que toi même ? C’est moi Dimitri, de la bande à Karamazov qui te parle.  Alors ca ne va pas ? Qu’est ce qu’y ne va pas ?  On a peur ? On a peur ? On se dit que le confinement ne s’arrêtera  jamais, et pour chasser cette peur parfaitement irrationnelle qui masque ta culpabilité, car tu sais que tu es coupable, tu souris maintenant dans la rue aux commerçants que tu méprisais, et la petite vieille dont tu penses qu’elle t’a donné le virus en partage tu la chasses de ton esprit en te disant que tu ne pourras pas l’égorger avec ton canif, et cette bienveillance qui te réconcilie avec toi-même, à ton avis tu peux nous dire d’où elle vient ? Sois lucide pour une fois. C’est Alexis de la Bande à Karamazov qui te dit une simple vérité, une  simple vérité. Maintenant tu as peur d’être enfermé dans ton silence, mais tu as toujours été enfermé dans ton silence. Tu aimes qui en fait ? Elle, ou elle, ou bien encore, elle, mais c’est qui elle ? Mais encore une fois vous avez peur de quoi monsieur Merejkowsky, de quoi avez-vous peur…hein ? , de quoi avez-vous peur ? En fait, toujours les faits, les faits sont têtus comme disait Wladimir Illitch,  d’un seul coup, monsieur Merejkowsky,  d’un seul coup vous comprenez que pour vous extirper des griffes de la peur qui serre impitoyablement votre gorge, vous n’avez désormais  pas d’autre solution que de vous répéter « elle m’aime » « elle m’aime » « elle m’aime », et c’est ainsi que pour donner corps à cette idée de l’amour, tu renonces à comparer le gardien de ton immeuble de rentiers bourgeois  à un KGBiste délateur, juste parce que tu as une crise de panique parce que tu t’étais imaginé que ton téléphone mobile ne fonctionnait plus, et que tu ne pouvais plus téléphoner à elle, et à elle, mais qui c’est elle,  et  jusque à la fin de tes jours  tu te retiendras de fondre en larme  en te souvenant qu’un gardien KGB délateur t’a dit de téléphoner depuis le téléphone fixe de sa loge autant que tu voulais à elle, elle, et encore elle, qui sait elle, tu sais qui c’est elle ? Et tu sais très bien que ce n’est pas fini,  tu penses que la Bande à Karamazov ne représente qu’un lointain souvenir de ton adolescence que tu as réussi jusque à cette assignation à domicile à refouler,  tu te refuses à admettre malgré les « faits »  que tu as besoin de chasser ton angoisse. Ton angoisse t’empêche de donner un sens à cette angoissante peur puisque tu ne peux plus monter dans un train de banlieue pour te ressourcer comme tu le prétends  dans le peuple qui est vérité,  tu ne peux même plus donner un cadre rationnel à ta peur en te laissant aller à  imaginer que tu vas être dénoncé par le gardien de l’immeuble, ou par la voisine dont tu t’es moqué dans ton récit Moi autobiographie 14 eme version publié par les éditions Sens et Tonka et adapté au cinéma par Lardux avec l’aide à l’écriture production CNC, Région Limousin , fond de soutien trois quart automatique, et  comme en plus depuis deux mois tu  es assigné à résidence puisque tu dois certifier suivant le décret 1547b de l’année 2020 que tu déplaces pour une personne en situation de vulnérabilité, alors que la personne en situation de vulnérabilité c’est toi, et pas elle,  tu ne peux plus justifier ta peur derrière une rassurante accusation  de fraude aux allocations d’activité solidaire d’insertion minimum,  car  en fait (encore les faits), Monsieur Merejkowsky, vous n’avez jamais admis votre amour, même pas pour « elle » vous vous dissimulez dans votre tunnel cinéma exclusion volontaire du monde artistique, parce que vous voulez que tout le monde parle de vous justement parce que vous faites en sorte qu’aucun de proche ne puisse lire vos textes ou voir vos films, alors vous vous répétez encore et toujours, parce que cette fois ci, pauvre petit Merejkowsky alors que vous n’êtes pas enfermé dans une prison, mais que vous pouvez descendre dans la cour des rentiers bourgeois,  avec ton vélo, ton téléphone, avec tes potes complotistes, loin des chars, des tanks, tu écoutes une autre voisine qui te dit qu’elle ne t’entend plus jouer du piano, alors que d’habitude quand tout va bien, bien, bien, tu t’en fous de la voisine puisque tu  joues du piano pour toi, toi, et comble d’ironie, terrorisé par ton angoisse qui a perdu toute rationalité, et qui serait en cette absence de sens sans fin,  tu finis par appeler ton père, tu entends tu finis par appeler ton père, ton père,  le Vieux… Ah ah c’est ton drôle.

Allo allo papa papa c’est moi ton fils

C’est moi ; qui, moi, qui qui moi moi, ton fils fils fils.

Le fils.

Et le père

Le père

Et le fils

Ah aha c’est trop drôle

Ahahahahahahahahahahahahahahahaha.

Tu commences à comprendre ?

Maintenant on est un beau petit toutou un petit chat hollandais qui frétille du museau.

Tu te décides enfin à aimer ? Toi elle ou elle ou encore elle? Ou toi?

Oui ? Non ? Sans opinion ?

Et prochainement quand l’assignation à résidence confinement coranovirus sera levée,

Tu applaudiras ?  « Bonjour Monsieur Merejkowsky, alors comment allez vous ce soir à vingt heures ? Vous vous sentez bien ? Vous dites que vous avez eu une grave crise de panique qui s’est matérialisée par la certitude que vous allier vous  jeter par votre fenêtre. Et elle, qui sait elle ? C’est elle ou elle ? Elle vous a dit de rester assis puis de vous lever puis de prendre l’Exomil  Roch et de descendre dans la cour, c’est une très bonne idée, vous ouvrez la porte, votre porte, pas les portes, mais votre porte et vous descendez dans la cour. Vous n’êtes pas déprimé, ni délirant bouffée délirante, ni schizophrène, il faut s’en tenir au fait, le fait, rien que le fait, vous n’avez plus la solution de fixer l’attention de votre cerveau sur l’horaire du train de banlieue qui allait pour reprendre votre expression vous conduire vers le peuple sacré, et c’est pour cette raison que vos crises de panique se déplace sur un passage à l’acte à travers une fenêtre,  je vous déconseille cependant le LSD pour retrouver des souvenirs avec votre père, c’est une très mauvaise idée qui ne ferait qu’aggraver vos angoisses,  il faudrait que vous puissiez mettre des mots sur cette angoisse,  de quelle peur s’agit il, ça, le ça, c’est ça le ça que nous ne savons pas,  c’est peut être une question  d’effondrement, le votre qui n’est pas l’effondrement moral collectif de la société »

« Les deux sont liés connard » hurle W. Reich.

«  L’effondrement personnel et l’effondrement de la société. »hurle W. Reich.

« Et Marie Bonaparte est une conne »hurle W. Reich.

« Un communiste ne recule jamais » hurle à vingt heures monsieur Merejkowsky en  souvenir de son père cadre par appétit de séduction du Parti Communiste Français

« Ils ont tenu à Stalingrad. Je tiendrai. » hurle à vingt heures monsieur Merejkowsky en  souvenir de son père cadre par appétit de séduction du Parti Communiste Français

 « Vous avez peur du vide ? Monsieur Merejkowsy ? hurle Sigmund.

Pièce jointe

Communique du Syndicat national des psychiatres

Chers concitoyens,

Etant donné que nous sommes inondés d’appels, nous vous informons que durant la période de quarantaine, il est  tout à fait normal de parler aux murs, plantes et autres pots.

Veuillez nous contacter uniquement si elles vous répondent.