A  comme avant

Vous avez raison. Parfaitement raison.  C’était il y a déjà combien de temps,  combien de jours que je prenais un café sur le zinc d’un des bars que je prends soin de fréquenter à intervalles irréguliers, c’était il y a combien de temps que nous avions passé une soirée à écouter la chanteuse roumaine accompagnée par le poète qui lisait Cioran, c’était déjà il y a combien d’années que nous avions traversé la passerelle des Arts qui enjambe la Seine, et le jour d’avant, d’avant, quelles paroles avais je prononcées, je ne m’en souviens pas, les paroles, elles ont disparu et je n’avais pas compris que les actes habituels du jour d’avant allaient devenir souvenir confus, tristesse, et qu’il nous serait impossible désormais de détailler le jour d’avant le premier jour du confinement et pourtant cet avant, habitait notre quotidien, le quotidien de la perte angoissante des êtres aimés, de la surveillance acharnée du petit chef derrière sa vitrine de verre, de la foule en marche avec leurs bagnoles électriques à piles éternelles, du courrier de la caf qui n’arrive pas et qui devrait arriver, de l’épouse,  de l’amant, des poux, des courses dans le marché traditionnel du quartier,  et de ce vide, ce vide, couplé à la sensation d’effondrement personnel et généralisé.

En quoi en fait cet avant était il exceptionnel ?

 

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